Balamand Monastery

Manuscripts

Summary in English: One hundred and seventy manuscripts represent a collection of great value. This treasure is a witness to a well-established spiritual and monastic life in Balamand., as well as a support for its cultural and pastoral work. Most of them date from the seventeenth, eighteenth and nineteenth centuries. The oldest ones date back to the thirteenth, fourteenth and fifteenth centuries, and bear bilingual Arabic  and Syriac writings. In spite of the preeminence granted to the Greek language since the Schism of 1725, we find only few manuscripts written in Greek. Illuminated Gospels dating from the seventeenth century were stolen in 1976 and have not yet returned.

Les manuscrits
Souad A. Slim

Dans le patrimoine orthodoxe d'Antioche, les manuscrits de Balamand, au nombre de cent soixante-dix, représentent un fonds de grande valeur. Présent dans l'histoire du monastère depuis sa reprise par les grecs-orthodoxes et sans cesse enrichi depuis, ce trésor a été 1'une des assises de la vie spirituelle et monastique de Balamand, en même temps qu'un support pour son action culturelle et pastorale.

Ce patrimoine n'est évidemment pas resté inentamé an cours des siècles. A diverses reprises, des manuscrits en ont été retirés pour être offerts par les patriarches et les évêques. En 1913, par exemple, le patriarche Gregoire IV a offert au tsar Nicolas II un lot de manuscrits puisés dans la bibliothèque du Patriarcat à Damas et dans celle de Balamand. D'autres manuscrits ont trouvé leur chemin vers des bibliothèques occidentales. Et, très récemment, durant la guerre du Liban, en 1976, des manuscrits ont été volés par des milices armées. Ils furent restitués en 1987, mais sans les évangiles enlumines de la fin du XVIIe siècle.

Les manuscrits ont longtemps été entreposés dans la bibliothèque de l'école c1ericale puis dans celle de l'Institut de théologie. Classés parmi les livres, ils étaient mis à la disposition des étudiants séminaristes.

La langue:
Les manuscrits qui, pour la plupart, remontent aux XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles sont écrits en arabe. Mais certains plus anciens, qui datent des XIIIe, XIVe et XVe siècles, portent à côté de l'arabe des écrits en syriaque. Ainsi, le liturgicon, livre de la messe (no 19), comprend deux colonnes écrites en syriaque et en grec. L'évangéliaire (no 77) reproduit des explications et des directives en syriaque. Dans un autre évangéliaire, (no 79), qui comporte douze pages sur les lois du typicon, les titres des Evangiles et des Epîtres, lues pendant les messes, sont écrits en arabe et en syriaque.

Les manuscrits écrits partiellement on complètement en syriaque étaient sans doute plus nombreux à Balamand mais, n'étant pas régulièrement utilisés et devenus trop anciens, leurs feuilles ont servi à la fabrication de reliures pour les manuscrits nouvellement copies au monastère. La décision prise par 1'évêque d'Alep Malatios Karmeh (plus tard le patriarche Efthymos III) dans la première moitié du XVIIe siècle de traduire les livres liturgiques en arabe à partir des sources grecques a achevé de marginaliser les copies écrites en syriaque.

La présence des manuscrits syriaques dans un monastère orthodoxe se justifie par la décision du patriarche Théodore Balsamon (1185-1191) de permettre aux peuples appartenant à l'église grecque-orthodoxe d'Antioche d'utiliser leur langue d'origine dans les célébrations et les prières liturgiques.

Malgré la priorité donnée à la langue grecque depuis le schisme des uniates en 1725, nous ne trouvons que très peu écrits rédigés en grec dans les manuscrits de Balamand. Ce sont surtout des références écrites dans les marges relatives aux chapitres et versets pris des écritures saintes. Même les passages qui sont récités en grec dans la célébration eucharistique sont écrits en lettres arabes dans le texte. Les patriarches d'Antioche d'origine grecque (1725-1899), comme Sylvestros, Daniel, Methodios on Hierothéos, qui ont visité Balamand, ont encouragé les moines à copier les manuscrits arabes et ont, eux-mêmes, offert des manuscrits arabes au monastère.

La valeur:
Les avis divergent quant à la valeur à attribuer à ce fonds. Le père Jules Leroy estime que, à part les manuscrits enluminés, la bibliothèque de Balamand n'offre pas d'intérêt particulier. A son avis, le monastère n'a pas joué un rô1e important dans 1'histoire littéraire. Les pères salvatoriens F. Freyjate et C. Haddad qui ont catalogué ces manuscrits en 1970, jugent, eux, que la richesse du fonds de manuscrits de Balamand s'explique par 1'activité intellectuelle traditionnelle des moines qui copiaient ou achetaient les anciens manuscrits.

En réalité, 1'importance des manuscrits vient de ce qu'ils couvrent différentes périodes et différents thèmes de la théologie et de la pensée orthodoxes. Par là, ils nous donnent une idée des épisodes successifs de la vie de l'église aux niveaux théologique, monastique, dogmatique et liturgique. En matière de théologie, les thèmes des manuscrits sont axés sur les écrits patristiques: des manuscrits entiers sont consacrés aux écrits et exégèses de saint Jean Chrysostome; des chapitres des œuvres de saint Basile le Grand et de saint Gregoire de Naziance sont répartis dans dix manuscrits et homéliaires; les sermons de saint Ephrem et saint Isaac sont également repartis dans plusieurs manuscrits, cela en plus des recueils consacrés aux deux pères.

Ces écrits se distinguent par leur caractère dogmatique et éthique. Significativement, la version arabe que donne le traducteur Abdallah Ibn al-Fadl repartit dans ses commentaires les exégèses de saint Jean Chrysostome en deux parties: une partie dogmatique qu'il nomme maqâla et une partie morale qu'il nomme 'iza.

Parmi ces œuvres théologiques, nous n'avons qu'une seule copie de L'Exposé de la foi orthodoxe de saint Jean Damascène et un seul apologétique attribue h saint Sophrone, Le Livre des preuves de la foi.

A côté des écrits patristiques, les manuscrits de Balamand insistent sur les œuvres monastiques. Nous avons notamment plusieurs copies de L'Echelle des vertus de saint Jean Climaque, du Jardin des moines publié par Germanos Farhat, évêque maronite d'Alep, et du Paradis intellectuel attribué à saint Gregoire de Nysse. La petite encyclopédie écrite par le moine Antichus du monastère de Saint-Saba existe en trois exemplaires, le Roman de Barlaam et Joasaph en deux exemplaires dont 1'un, très ancien, porte neuf enluminures qui illustrent la vie de ces deux saints. Le style des enluminures traduit 1'interaction des différentes tendances de 1'iconographie Byzantine et syriaque avec 1'art islamique, dans ce qui est 1'une des premiers versions arabes chrétiennes de la vie de Bouddha, adaptée à la foi chrétienne à partir d'une version géorgienne traduite en grec.

Outre ces recueils, des articles ou des extraits sont répartis dans d'autres livres tels que les écrits monastiques de saint Nilus, la lettre de Philoxenos, évêque de Manbig, sur la hiérarchie monastique, des nouvelles des moines égyptiens, 1'ethique sociale et spirituelle des moines...

Ces écrits patristiques, théologiques et monastiques qui remplissent quarante-quatre manuscrits, sont inégalement répartis sur cinq siècles : un manuscrit remonte au XIIIe siècle, cinq datent du XVe, trois du XVIe, quatorze du XVIIe, huit du XVIIIe et treize du XIXe.

Dans la rubrique théologie et spiritualité, nous avons un certain nombre de manuscrits que nous retrouvons dans tons les couvents et monastères orthodoxes, tels que Les Homélies d'Elie Meniates, La Corne évangélique, Le Salut des pêcheurs, Les Miracles de la Vierge, qui sont autant d'échantillons des écrits orthodoxes qui, à travers les siècles, se sont caractérisés par leur insistance sur l'enseignement de la vraie foi par le biais des homélies.

Malgré le rôle joué par Balamand au moment du schisme des uniates, nous ne retrouvons que trois manuscrits reflétant la polémique entre catholiques et orthodoxes. Ainsi nous avons seulement deux manuscrits des œuvres du patriarche grec-orthodoxe de Jérusalem Nektarios : Peri tis archis et Artibus quibus missionarii patini, de même que nous avons une polémique entre catholiques et orthodoxes sur la primauté du pape et un autre article contre le concile de Florence. De ces manuscrits, initialement au nombre de vingt-cinq, ne subsistent plus que vingt-deux, dont dix sont datés: un manuscrit du XVIIIe siècle et neuf du XIXe.

Nous retrouvons aussi dans les manuscrits de Balamand des hagiographies qui, sous forme de synaxaire ou de << Vie et miracles des saints >>, offrent des exemples à suivre en matière de foi et de sainteté. Lus pendant les cé1ébrations liturgiques suivant 1'éphéméride, ils sont, bien entendu, destinés aussi à honorer les saints et les martyrs. Dans cette rubrique, nous retrouvons des vies et miracles de saints, des questions et réponses sur certains miracles et épisodes de la vie du Christ, des extraits du synaxaire plus développés pour certains mois. Bien que peu nombreux, ces manuscrits s'étalent sur plusieurs siècles : un manuscrit du XVe siècle, trois du XVIe, dix-sept du XVIIe siècle et un du XIXe.

Plusieurs manuscrits du fonds de Balamand consistent en un ensemble d'extraits pris de différentes sources. Ces manuscrits appelés majmû' regroupent des récits hagiographiques, des homélies, des extraits de l'euchologue ou du Livre des heures ou des textes de l'évangile. Ils sont regroupés et copies l'un à la suite de l'autre sans aucun ordre chronologique ou thématique. Certains de ces majmû' peuvent avoir été utilisés dans les liturgies comme homéliaires. Mais d'autres semblent avoir été des recueils personnels où les moines copiaient ce qui convenait à leur piété et à leur culture religieuse. Quelques-uns de ces manuscrits n'ont pas le même genre de feuilles ou d'écriture pour tous leurs articles ; ils ont probablement été écrits à des époques différentes par différents copistes et pour différents manuscrits. Les manuscrits originels s'étant dégradés avec le temps, les moines ont récupéré les articles qui pouvaient être conservés et les ont relies ensemble. Le but de ce genre de manuscrits semble être surtout didactique. Il s'agissait de mettre à la portée des jeunes moines et des fidèles un ensemble de textes jugés essentiels à leur culture religieuse et spirituelle. Nous avons dix manuscrits appelés majmû'. Cinq autres, formes d'homélies, semblent avoir le même but didactique.

Dans cette bibliothèque, dominent largement les ouvrages liturgiques. Le souci d'entretenir et de promouvoir les manuscrits liturgiques qui se reflète là, tient naturellement au fait que c'est par la liturgie que se transmet au peuple l'enseignement religieux et que c'est elle aussi qui le maintient dans la foi. Ce fonds liturgique est constitué de quatre-vingt-dix-sept manuscrits qui présentent un large éventail des manuels du rite byzantin: seize rituels de la messe (qindaq), six horologues (sawa'i), dix-huit euchologues, trois anthologues, seize monologues (minawun), cinq triodes (triodi), trois paralectiques (mu'azzi), deux octoèques (istichari), un pentecostaire (benedekstari). Quatre évangéliaires, trois épistoliers, quatre psautiers, deux textes des prophéties sont aussi considérés comme des livres liturgiques, dans la mesure où les textes des Ecritures sont répartis sur les célébrations des jours de fêtes et des dimanches selon le rituel de la liturgie orthodoxe. Nous retrouvons aussi dans cette rubrique deux cé1ébrations liturgiques pour les saints non cités dans le menologue, un typicon, deux manuels comput pour la répartition des fêtes orthodoxes, cinq règlements liturgiques et prières rituelles, un manuel de musique religieuse, deux manuels nécessaires au clergé.

C'est dans cet ensemble que nous retrouvons le plus grand nombre de manuscrits anciens. Certains sont aussi très rares. Nous avons en effet cinq manuscrits du XVIe siècle, vingt-cinq du XVIIe single, vingt-quatre du XVIIIe siècle et quarante-trois du XIXe. On peut donc supposer qu'une étude détaillée et comparée de ces manuscrits ferait mieux connaître l'evolution du rite byzantin au sain du patriarcat d'Antioche durant les quatre derniers siècles.

Quatre manuscrits seulement sont consacrés à l'histoire de l'église. Il s'agit surtout des œuvres d'Orsi et de Théodore, évêque de Monophasie, traduites au XVIle siècle par le célèbre peintre d'icônes alépin Yousuf al-Mousawwir, et le cure Boulos al-Za'im, grâce aux encouragements du patriarche Makarios al-Za'im, qui en a lui même traduit une partie. Deux manuscrits consacrés aux conciles traitent des lois ecclésiastiques et du Droit Canon byzantin. Sur ces six manuscrits, un seul date du XVIIe siècle, deux sont du XVIIIe et les trois derniers du XIXe.

Dans la rubrique Livre saint, nous n'avons que sept manuscrits : un kachkoul (ensemble d'articles comprenant des résumés des différents chapitres de la Bible), cinq Evangiles, une copie du livre de Josué. Ces sept manuscrits sont ainsi répartis : un manuscrit du XVIe siècle, deux du XVIIe, deux du XVIIIe et deux du XIXe.

C'est dans cet ensemble que nous retrouvons les deux précieux évangiles enluminés peints par Yousuf al-Musawwir à la fin du XVIle cycle. Ces deux Evangiles n'ont pas été rendus avec les manuscrits restitués en 1987.

L'évangile no 3 (505) a été copie en 1621 par Talgé ibn al-Khouri Hawran de Hama. Ce copiste très connu est le frère du patriarche Efthymos Karmeh. Les textes sont précédés par les portraits des évangélistes dont les noms, sauf celui de Luc, sont inscrits en grec. Les têtes de chapitre sont autant de rectangles à fonds dorés parsemés de fleurettes, meublés de palmes et de médaillons quadrilobes. Quant à l'evangile no 6 (499), il ne porte ni les noms du copiste et du peintre ni le lieu et la date de transcription. Des inscriptions dédicatoires rédigées en grec, en arabe et en géorgien, indiquent seulement que le livre fut offert en 1692 par Grégorios, fils du sacristain d'Alep et évêque d'Erzeroum, au monastère Notre-Dame de Balamand.

Cette inscription en géorgien à la fin du manuscrit amène à en chercher 1'inspiration dans les œuvres byzantines d'époque plus rapprochée dont on retrouve des exemples dans tons les pays qui ont été dans la mouvance byzantine. Le dessin, l'ornementation, le drape, la disposition des sujets, tout dans le style indique une influence byzantine qui est évidante en ce milieu.

Dans ces enluminures, les saints évangélistes accompagnés de leurs symboles sont figurés assis, tournés vers la gauche. Leurs types physiques répondent aux formules classiques en usage dans l'art chrétien. Quant aux bandeaux qui ornent les tètes de chapitres, ils sont plutôt d'inspiration islamique. Ils rappellent les ornementations des Corans de l'époque médiévale. En ce sens, ces Evangiles se situent dans la lignée des manuscrits arabes chrétiens où des miniatures figuratives de style byzantin sont juxtaposées à des illustrations et ornementations de type islamique.

Souad S. Slim



MS An Namuss Ash Shariff or the Book of Canons, 1866, written by Constantine Daoud of Homs, 44x29 cm.

Barlaam & Joasaph
MS 147 (6), XIII c.
28x20.5 cm, 200pp.

Gospels of John & Luke
* MS  6 (499), XVII c., 29x19.5 cm., 432pp.

Gospels of
Matthew and Mark
* MS  6 (499), XVII c., 29x19.5 cm., 432pp.

Gospel of John
MS3 (505), XVII c.,
30x20 cm, 406 pp.


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